Le 27 octobre 2025, Elon Musk a dévoilé Grokipedia, une encyclopédie en ligne conçue par son entreprise xAI. Présentée comme une alternative à Wikipédia, la plateforme revendique une approche “neutre” de la connaissance. Mais derrière ce discours d’objectivité, Grokipedia s’impose surtout comme un nouvel outil de la guerre culturelle menée par Musk contre les médias et institutions qu’il juge “corrompus” par l’idéologie progressiste.
Une encyclopédie générée par l’IA Grok de xAI
Créée par xAI, la société d’intelligence artificielle de Musk, Grokipedia repose sur Grok, son modèle conversationnel déjà intégré au réseau social X (ex-Twitter). Musk présente cette encyclopédie comme une “collection complète de toutes les connaissances humaines”, rédigée intégralement par l’IA.
Pour l’instant, avec « seulement » 885 279 articles, contre près de 8 millions pour Wikipédia, l’outil concurrent d’Elon Musk est encore loin du compte. Lancé ce lundi, Grokipédia a d’ailleurs connu un crash momentané.
L’objectif affiché pour cette plateforme est clair : rivaliser avec Wikipédia, accusé par Musk d’être “une extension de la propagande des médias traditionnels”. Le milliardaire affirme vouloir offrir un espace soi-disant neutre et libéré de biais idéologiques, mais ses choix éditoriaux trahissent une orientation bien différente. Les articles sont rédigés dans un ton qui épouse fréquemment les positions politiques de Musk, qu’il s’agisse de ses critiques du “wokisme” ou de son admiration pour certaines figures conservatrices.
Le lancement de Grokipedia avait d’ailleurs été reporté quelques jours plus tôt, Musk expliquant alors qu’il fallait “travailler davantage pour purger la propagande”. Pourtant, ironiquement, le modèle semble avoir été entraîné sur des textes de l’encyclopédie qu’il cherche à attaquer, certaines pages avouant même que leur contenu est “adapté de Wikipédia”, comme le rapporte The Verge.
Des pages qui reflètent la vision politique d’Elon Musk
L’analyse des premières pages publiées révèle un biais marqué à droite, voire proche de l’extrême droite. Par exemple, la page consacrée à Adolf Hitler évoque d’abord son “leadership” et ses “succès économiques rapides” avant d’aborder la Shoah. Celle sur l’islam remet en question la compatibilité de la religion “avec la démocratie libérale”, tandis que l’entrée sur l’apartheid s’attache longuement à “démystifier les récits dominants” qui présentent ce régime comme un système “d’oppression totale” envers les Noirs sud-africains.
Certaines formulations trahissent aussi une récupération idéologique : la “théorie du génocide blanc” y est décrite comme un sujet légitime d’étude, appuyé par des “fondements empiriques”, là où Wikipédia parle explicitement de “théorie du complot”. D’autres ressources, comme celle consacrée à la guerre en Ukraine, citent directement les discours du Kremlin pour décrire l’invasion russe comme une opération de “dénazification” et de protection des populations russophones contre une supposée persécution.

Même la biographie d’Elon Musk y est arrangée à sa convenance. L’article met en avant sa perte de poids et son goût pour l’haltérophilie, mais omet toute référence à son grand-père maternel, connu pour son soutien au régime d’apartheid, nous informe The Atlantic.
Ces choix de rédaction traduisent une réécriture du savoir alignée sur la vision idéologique de Musk : une méfiance envers le multiculturalisme, les institutions médiatiques et les mouvements progressistes. De manière générale, cela interroge sur l’utilisation de l’IA à des fins de désinformation, comme c’est le cas aussi avec les fake news et les deepfakes.
Grokipedia : Une nouvelle offensive contre les médias et les discours progressistes
Grokipedia n’est pas un projet isolé. Il s’inscrit dans la stratégie globale de Musk pour remodeler l’espace de l’information. Depuis son rachat de Twitter en 2022, le milliardaire a rétabli de nombreux comptes d’extrémistes bannis et ajusté les algorithmes de la plateforme, provoquant une “hausse sans précédent” des discours haineux selon plusieurs chercheurs.
Le lancement du chatbot Grok en 2023, qui a depuis été ajusté pour mieux répondre aux idéaux de Musk, visait déjà à contrer ce qu’il qualifie de “biais de gauche” dans les grands modèles d’IA. Grokipedia en est la suite logique : une tentative de bâtir un écosystème médiatique parallèle, comparable aux plateformes conservatrices comme Rumble ou Truth Social, plébiscitée par Donald Trump.
Derrière l’ambition affichée pour xAI de “comprendre l’univers”, Musk cherche avant tout à reconfigurer la connaissance selon ses propres codes. Dans l’esprit de Fondation d’Isaac Asimov, qu’il cite volontiers parmi ses romans préférés, il envisage même d’envoyer des copies de Grokipedia “sur la Lune et sur Mars pour la préserver pour le futur”. Une façon de s’ériger en bâtisseur d’une nouvelle civilisation intellectuelle, modelée « à son image », analyse The Atlantic.
En à peine quelques jours d’existence, Grokipedia s’impose déjà comme le miroir des convictions personnelles d’Elon Musk. Ce projet fusionne sa défiance envers les médias, sa foi dans la technologie et sa volonté d’influencer la manière dont l’humanité organise le savoir. Plus qu’une encyclopédie, Grokipedia est un manifeste politique ; une réécriture du monde par une IA façonnée à l’image de son créateur. Et à travers elle, Musk ne se contente plus de contester Wikipédia : il cherche à refonder l’autorité même du savoir, selon sa propre vision de la vérité.
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Grokipedia semble intéressant, mais j’ai des doutes sur sa neutralité. Savoir doit être partagé sans biais, sinon cela devient de la manipulation. Qu’en pensez-vous ?
Grokipedia semble prometteur, mais il est essentiel que la vérité ne soit pas altérée. L’histoire mérite d’être racontée sans biais. Explorons ensemble, mais restons critiques !
Gil, l’analyse est pertinente. Grokipedia semble être plus une réflexion des biais de Musk qu’un réel projet d’encyclopédie neutre. Il est crucial de rester vigilant face à ce type d’initiatives.